Se découvrir autrement !
Comment amener les élèves à prendre confiance en eux et à libérer leur créativité pour renouer avec l’envie d’apprendre, d’aller plus loin? C’est cette question inscrite avec force dans le projet éducatif lassalien qui a animé mon désir de faire un atelier d’écriture avec la classe de seconde professionnelle des Métiers de la Relation Clients du Lycée des Métiers Saint-Genès Lasalle à Bordeaux. Cette classe étant composée d’élèves curieux et pleins d’énergie, je voulais les amener à faire émerger tout leur potentiel. D’ailleurs, c’est bien là tout l’enjeu du Lycée des Métiers où toute l’équipe éducative s’attache à donner confiance aux jeunes et les accueille en leur donnant toute leur attention au vu de l’hétérogénéité de leurs parcours.
Or c’est aussi l’histoire d’une rencontre avec Fabien Modolo alias Keurspi, dont le nom d’artiste renvoie au mot anglais «speaker»; cet artiste écrit des textes de rap depuis de nombreuses années et fait aussi de la scène.
Les messages qui émanent de ses textes prônent l’ouverture d’esprit et le dépassement de soi. Fabien Modolo a également travaillé en tant qu’éducateur au collège Saint-Genès La Salle de Bordeaux et propose désormais des ateliers d’initiation au rap dont l’objectif est d’apprécier la dimension esthétique et créative de la parole et de s’exprimer devant un groupe.
Christine Castaings, la Directrice du Lycée des Métiers m’a apporté son soutien total ainsi qu’une belle dose d’enthousiasme qui m’ont permis de mener ce projet à bien. Celui-ci a fait vivre l’objet d’étude du programme de lettres intitulé «Dire et se faire entendre: la parole, le théâtre, l’éloquence» dont l’objectif est d’apprécier la dimension esthétique et créative de la parole. Ce chapitre s’articule autour de l’oral donc créer et réciter des poèmes ou des chansons permet de faire un travail sur la voix, le ton, le débit, le souffle et le rythme. En terme de créativité, je souhaitais que l’élève trouve sa propre voix.
Après une séance sur l’origine du rap, les élèves ont fait des exercices sur la langue et les sonorités pour jouer avec les rimes. Malgré des débuts parfois compliqués, une fois que la confiance s’est installée, que les masques sont tombés et que le regard des autres n’a plus été un frein à l’expression, les élèves se sont enfin révélés. Une énergie de groupe s’est créée et de belles surprises ont pu émerger.
La future étape a consisté à laisser chacun écrire un couplet ou alors travailler en groupe sur des thèmes qui leur étaient chers comme l’injustice ou la construction de soi. Néanmoins, la création n’est pas synonyme de liberté absolue: certaines contraintes sont de mise telles qu’écrire des vers devant comporter un certain nombre de syllabes; évidemment, la vulgarité est exclue. Avoir conscience de la valeur des mots et du sens qu’ils véhiculent est de prime importance. Enfin, les élèves ont choisi une mélodie parmi celles proposées par Keurspi.
Un travail a été effectué sur la mise en voix, la prosodie, le rythme et la diction.
Puis le jour de l’enregistrement est arrivé durant lequel chaque élève a déclamé son couplet à l’auditorium avec Pierre Guilon à la technique, et ce pendant trois heures.
Keurspi a accompagné les élèves dans le processus de création avec pédagogie et bienveillance. L’atelier s’est révélé être également un formidable exutoire pour certains et un véritable travail sur soi à travers la création artistique.
Ce projet a réussi en ce sens que de nombreux élèves sont parvenus à exprimer leurs talents cachés à travers l’écriture de textes personnels.
Ingrid Hoyela, enseignante
Quoi de mieux pour clore cette expérience que de l’illustrer avec les couplets d’une élève inspirée et inspirante, Théaline Boidron:
C’est vrai que pour l’instant je ne suis qu’au lycée
Mais je pense quand même à réaliser mes projets
Je ne suis pas parfaite mais je fais tout pour m’accrocher
Je n’abandonne jamais, c’est impossible de m’arrêter
J’ai foiré mon dernier projet donc ça va être la résurrection
Mon cerveau chauffe, il est en pleine ébullition
Là, je commence à penser et à faire la constitution
Et dans pas longtemps mon entreprise sera en construction.
Ca m’arrive de douter mais je sais que je peux y arriver
Toujours positive malgré les obstacles à surmonter
Cette mentalité, je l’ai grâce à mon passé
Car ce sont les difficultés qui m’ont permis de me forger.
Ma tête c’est Netflix, toujours remplie de films incompris
Le soir je m’imagine des scénarios dans mon lit
Je me demande si je pourrai réussir ma vie
Si un jour mes objectifs seront accomplis.